1ère partie : du synopsis au crayonné.
Hello à tous,
Voici un petit aperçu des différentes phases de travail par lesquelles passe chaque planche de l’album. Ceci vous donnera une idée précise de la manière dont je bosse. Par sa simplicité et sa lisibilité, la planche 20 m’a paru un bon choix pour illustrer ce making of.
Étape préliminaire : Le synopsis séquencé.
Le synopsis séquencé est un résumé de l’histoire en quelques pages, où l’intrigue est détaillée scène par scène. C’est à l’étape du synopsis que se déterminent les questions cruciales de rythme, d’intentions, d’ellipses… Lorsque je travaille sur le synopsis, je cherche à obtenir une vision très précise de l’enchaînement des séquences, des informations qu’elles devront contenir ou ne pas dévoiler, des décors et des protagonistes qu’elles présentent, du rythme de lecture rapide ou lent qu’elles doivent induire, entre autres. Bien entendu, il est important d’avoir une idée la plus claire possible de ce que l’on cherche à raconter. Même si l’on ne souhaite pas spécialement transmettre un « message », il est bon de savoir qu’il en passe toujours un, ne serait-ce qu’à travers la structure de l’histoire ou le choix des protagonistes et de leurs succès et échecs. Autant donc essayer de contrôler ce qu’on est en train de dire. C’est sans doute, à mon avis, la phase la plus cruciale de toute la création de l’album, c’est pourquoi il faut bien la soigner.
A ce stade, les numéros de page ne sont pas encore déterminés, mais je sais déjà que telle scène comptera X planches. Par exemple, la scène 5 comptera 4 ou 5 pages (parmi lesquelles la future planche 20). Typiquement, chaque album compte environ une vingtaine de scènes : 21 pour Neandertal T1, 23 pour le tome 2 (à ce jour).
Étape 1 : Le scénario découpé/dialogué.
L’écriture du scénario, élaboré à partir du synopsis, est pour moi l’étape où je détermine un premier découpage en planches et en cases, au jugé, sans dessiner, juste en visualisant mentalement. Le fait d’écrire une phrase ou deux pour décrire chaque case me permet de vérifier, par exemple, que je n’ai pas oublié une info importante, et que l’enchaînement narratif fonctionne bien. Il va de soi cependant que le story-board crayonné rectifie quasiment tout le temps ce premier jet. C’est aussi à cette étape que j’écris les premières versions des dialogues, qui seront conservés tels quel ou remaniés plus tard.
Étape 2 : Le story-board.
Contrairement au scénario, réalisé d’une traite sur une durée de quelques semaines, je réalise le story-board de chaque planche au fur et à mesure de la création de l’album. Ce croquis rapide, griffonné sur un A4 plié en deux*, est l’occasion de « mettre à l’épreuve » le pré découpage du scénario. Des fois ça fonctionne facilement, et des fois c’est compliqué. Il peut m’arriver de devoir essayer trois ou quatre versions d’une même planche avant de trouver la bonne composition. C’est à cette étape que se détermine le choix des plans (plan d’ensemble, gros plan…), des angles de vue (plongée, contre-plongée)… C’est aussi à ce moment qu’il faut bien penser à ce qu’induit comme sensation de lecture le format de chaque case : en hauteur ou allongée, petite ou grande…
*comme je colle ces feuilles pliées ensemble, j’obtiens à l’arrivée un mini album format A5 quasiment illisible mais auquel j’ai fini par m’attacher.
Étape 3 : Le crayonné.
Première étape de la création de la planche proprement dite, la réalisation du crayonné demande grosso modo une journée de travail pour chaque planche. Je travaille sur format raisin (50x65cm) mais le cadre réel que j’utilise, hors marges, est 33x48cm. Le crayonné est une mise au propre du story-board, souvent avec des corrections par rapport à ce dernier, également. Il faut cependant essayer de ne pas trop s’éloigner du story-board, car, conçu en tout petit, celui-ci possède des compositions vigoureuses et une concision qu’il est bon de ne pas trop perdre. Le risque en général est de « ramollir » la compo par rapport au story-board, et surtout de se paumer dans des détails en s’éloignant de l’essentiel. Une chose importante à cette étape est le calage des dialogues dans les bulles. Les bulles sont tracées « au jugé » dans un premier temps. Puis je scanne la planche et intègre mes textes à celle-ci sur photoshop. Si je constate que la bulle est trop petite, trop grande ou mal placée, je modifie en conséquence le tracé de la bulle sur l’original.
J’envoie les crayonnés de chaque planche à l’éditeur qui les relit attentivement (une nouveauté de cette série). C’est alors parfois l’occasion d’une saine discussion, où un œil extérieur avisé peut me permettre de me rendre compte de difficultés de lecture ou de confusions. Dans ce cas, je prend ma gomme et j’améliore le tir.
Finalement, lorsque tout est calé, je me mets à l’encrage.
8 commentaires:
C'est toujours intéressant de comparer les "modes opératoires" des uns et des autres... On arrive vite de cette façon à déceler les lignes-forces d'un travail... Je viens de recevoir le dépliant promo de "Néandertal" en provenance de chez Delcourt... et tout ce que je peux dire c'est "Vivement novembre !"...
salut Olier,
tu as bien reçu l'errata que j'ai rédigé, avec le dépliant promo ?
oui, Manu, pas de problème ! L'errata était bien dans le dépliant... sur feuille séparée et dactylographiée...
Il est vraiment intéressant et instructif - d'autant plus que je ne suis qu'une lectrice - de suivre le cheminement qui conduit à l'oeuvre finale. Chaque auteur a ses spécificités dans son travail, mais les règles principales sont suivies par tous. Merci de bien vouloir nous faire partager cette évolution qui donne un cachet de plus quand j'aurai l'immense plaisir de lire "Néandertal". Bravo !
Merci professeur Roudier..
C'est tout à fait ça.
Je n'aurai pas dit mieux.
Ton séquencier fait combien de pages pour un album?...
Moi, ça dépend, parfois j'en fait un, parfois, pas du tout. Juste un gros synopsis et hop, j'attaque le scénario.
Hello Ronan,
En général mon séquencier fait 4 ou 5 pages.
Par contre je suis moins rock'n roll que toi. Je ne pourrais pas me passer de ces quelques pages !
rien compris...
m'en fout, moi je le lirai, je le mangerai, je l'idolatrai, je le tarasboulbalerai cet album.
parce que manu le vaut bien.
Bonsoir !
Quand j'aurai tes oeuvres entre les mains, Manu, sûr que je les idolâtrerai tout autant que Stéphane Créty qui propose même de les "tarasboulber"... Ce néologisme barbaresque steppique me plaît beaucoup ! Quelle en est la définition, Stéphane ? C'est très drôle !
Tinky, mdr.
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